Marie-Claude L'Archer - Le blogue

Je mets mes limites!

par | Déc 16, 2019 | Communication, Croissance personnelle | 0 commentaires

Les relations humaines nous confrontent invariablement à des situations difficiles auxquelles nous préférions ne pas devoir faire face. Le polyamour a tendance à exacerber cela, car les décisions prises par chaque partenaire ont potentiellement un impact sur nous. Certaines de leurs décisions et actions passent inaperçues et ne changent rien à notre vie et à notre relation. D’autres décisions et actions affectent directement notre vie et notre état émotionnel de manière incommensurable. Face au prospect de perturbations émotionnelles, l’un des mécanismes de protection à développer en tant que polyamoureux est d’avoir des limites personnelles claires, et de bien les exprimer.

Mettre ses limites : Un geste de protection émotionnelle

Il existe une certaine confusion à propos de ce que « mettre ses limites » signifie. Une limite n’est pas à propos de ce que quelqu’un d’autre peut ou ne peut pas faire. C’est à propos de ce que nous on va faire, advenant que la personne prenne une décision xyz qui nous affecte émotionnellement. L’objectif d’une limite personnelle n’est pas de punir l’autre de ses choix et actions, mais de nous protéger émotionnellement dans une situation difficile. Si on met notre limite sur l’autre personne (« tu ne peux pas sortir avec telle personne »), alors notre pouvoir personnel est réduit à zéro, car l’autre peut toujours décider de ne pas respecter les règles qu’on lui impose. Par ailleurs, ca ne respecte pas sa propre liberté d’être humain autonome et souverain.

Parce qu’on ne peut pas contrôler ce que les autres font, il est essentiel que nos limites personnelles soient quelque chose sur laquelle nous avons de l’emprise. C’est une action qu’on pose pour soi-même. Pour se protéger, pour avoir le temps de réfléchir et y voir plus clair, pour rester authentique avec nos valeurs et nos désirs, indépendamment de ce que font les autres et qui peut nous blesser. C’est pas facile à faire, mais c’est le seul moyen de ne pas vivre en victime des autres et de leurs actions.

On peut bien entendu exprimer un malaise face à certaines situations. Exemple : « Lorsque tu rentres de ta date très tard et que je dois aller dormir seule, je deviens anxieuse ». On peut également formuler une demande claire. Exemple : « Lorsque tu rentres tard d’une date, j’aimerais que tu m’envoies un petit texto pour me souhaiter bonne nuit, histoire que je sache que tu penses encore à moi même si tu es absent ».

L’important à se rappeler lorsqu’on formule une demande claire, c’est que la personne en face de soi est libre d’accéder à notre demande ou pas. Bien entendu, parce qu’il ou elle souhaite atteindre un polyamour optimal et vivre ses relations le plus harmonieusement possible, le ou la partenaire sera vraisemblablement enclin à acquiescer à des demandes, ou à essayer de négocier un compromis qui ne porte pas atteinte à la qualité de son temps avec l’autre partenaire et qui pourrait répondre également à votre besoin. En effet, on ne peut imaginer qu’une personne qui, au nom de sa liberté personnelle, dirait toujours non à tout ce que ses partenaires lui demandent. Cette personne perdrait bien vite tous ses amoureux-ses, car l’amour consiste également à vouloir le bien-être de l’autre autant que cela est en notre pouvoir et que cela ne compromet pas notre propre bonheur. Considérant que les relations amoureuses sont fondées dans une certaine réciprocité – des sentiments, des manifestations d’amour, et également des compromis – une personne qui ne ferait aucun compromis pour ses partenaires serait en mauvaise position lorsque viendrait son tour de demander une faveur à son-sa partenaire s’il-elle dit toujours non à ce qu’on lui demande.

Recevoir un « non »

Ceci dit, il arrive tout de même des moments où un-e partenaire, après avoir entendu nos émotions avec empathie, nous avoir donné du soutien et avoir pesé le pour et le contre d’une demande claire que nous leur avons formulé, prend néanmoins la décision de ne pas acquiescer à notre demande.

Ces moments sont particulièrement éprouvants, car nous ne sommes pas habitués à entendre un refus de la part d’une personne qui nous aime. On a souvent l’idée biaisée que si notre partenaire nous aime, il-elle devrait toujours dire oui à tout ce que nous demandons.

Or, la première responsabilité de chaque personne est d’abord et avant tout envers elle-même. Notre partenaire, peu importe combien il-elle nous aime, doit s’assurer qu’il-elle ne fait pas des compromis au point où il manque de respect envers sa propre personne et ne fait pas des choix qui sont au détriment de son propre équilibre ou bien-être. Nous devons donc nous reprogrammer à propos du « non » afin de le voir non pas comme un geste par lequel mon-ma partenaire m’offense, mais un geste à travers lequel il ou elle se respecte soi-même et s’assure de demeurer dans l’authenticité concernant ce qu’il ou elle veut dans ses relations. Lorsque nous acceptons le « non » des autres avec cette perspective, nous sommes également davantage capables d’affirmer nos propres « non » et de vivre à notre tour dans le respect de soi et l’authenticité.

La différence entre limite personnelle et manipulation

Malheureusement, il arrive que pour se protéger émotionnellement des choix et actions des autres, la seule mesure suffisante soit de nous extraire complètement de la situation qui nous affecte trop et en mettant fin à une relation, voire en coupant tout contact avec la personne concernée. Dans la phrase « si tu choisis d’être en relation avec telle personne, je ne pourrai plus être avec toi », la distinction est bien mince entre une limite personnelle clairement établie et une tentative de manipulation. La nuance entre les deux est que dans le cas d’une limite personnelle, on a beau préférer une option plutôt que l’autre, notre action ne consiste pas à tenter de forcer l’autre à faire ce qu’on veut, mais bien à définir les actions que nous allons prendre le cas échéant.

Si tout ce que nous voulions était de manipuler l’autre pour qu’il fasse ce qu’on voulait, et qu’il ne le fait pas, notre plan vient de tomber à l’eau. Notre stratégie a échoué. Si, par contre, nous étions dans le respect de l’autonomie de l’autre et dans l’auto-responsabilité, le travail ne fait que commencer, c’est à dire le travail d’accueillir nos émotions, quelles qu’elles soient : colère, tristesse, déception, jalousie, ressentiment, envie, etc. Aussi douloureuse que soit la situation, le pouvoir de choisir ce que nous ferons pour retrouver un état de bien-être et d’équilibre le plus rapidement possible est entre nos mains.

Heureusement, une limite ne consiste pas toujours à mettre un terme à la relation, et certaines déceptions peuvent être surmontées avec du temps, de la communication, et du travail sur soi.

 

Avez-vous des anecdotes de moments où vous avez du mettre des limites? Comment cela s’est-il passé? Quel a été le résultat? Racontez-moi!

Affectueusement,

Marie-Claude, alias Hypatia

 

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