J’entends souvent que la compersion n’est pas nécessaire pour être polyamoureux. Techniquement, c’est exact. On peut très bien vivre sans. Mais ça me fait réagir, de la même façon que je réagirais si quelqu’un disait que le bonheur n’est pas nécessaire pour être humain. C’est comme dire qu’on n’a pas besoin de viser ce qui nous fait nous sentir le mieux dans la vie.
Je comprends tout de même d’où ça vient. D’une part, dire que la compersion est importante peut sembler dire que nous ne devrions jamais nous sentir jaloux. Ce qui n’est absolument pas mon point. Il est tout à fait normal de ressentir de la jalousie. C’est une émotion humaine et la plupart d’entre nous la ressentons. Les polyamoureux n’y sont pas immunisés et ne devraient l’être pas non plus, car la jalousie, lorsque bien comprise, est un signal important qui nous dit qu’une situation requiert notre attention. Je suis contre le jalousie-shaming. Je crois au contraire que la jalousie devrait être accueillie avec empathie.
Il y a aussi des gens qui ne sont pas super émotifs. La jalousie leur est aussi étrangère que la compersion. Tout ça leur semble des effusions exagérées pour le niveau de rationalité qui leur est habituelle. Ils n’ont pas de compersion, mais n’en souffrent pas non plus, bien au contrare. Il faut bien se garder de faire sentir à ces personnes qu’ils devraient se répandre en effusions d’émotions positives face à la vie sentimentales de leur partenaires si ça ne leur fait ni chaud ni froid. Chaque polyamoureux devrait se sentir le droit d’être ce qu’il est.
Ceci dit, je pense qu’il ya une autre raison pour laquelle les gens disent que la compersion n’est pas nécessaire pour les polyamoureux: s’ils disaient «la compersion est importante», la question suivante serait «comment faire pour l’atteindre?» Le fait est que c’est une question dont peu de gens savent la réponse; soit la compersion leur tombe dessus par magie et ils sont contents, soit la compersion n’a pas lieu et il semble qu’il n’y ait rien qu’on puisse y faire.
Il y a quelques années, quand j’étais néophyte en matière de polyamour, j’étais fort perplexe: certains jours, je débordais de compersion. J’étais si heureuse de voir mon mari amoureux d’une autre femme! C’était comme une seconde nature pour moi. Mais d’autres jours, j’étais au contraire insécure, confuse, craintive et, évidemment… intensément jalouse. Je jetais alors le blâme sur mon mari pour avoir fait quelque chose qui m’avait mise dans cet état, m’imaginant que si je me sentais jalouse, ça devait être de sa faute.
Je suis une personne très rationnelle et j’overthink à peu près n’importe quel sujet. Il me semblait assez paradoxal que je sois parfois si compersive et d’autres fois si jalouse. Qu’est-ce qui a faisait la différence? N’étais-je pas la même personne? Pourquoi ne pouvais-je pas ressentir de la compersion tout le temps? (ou pourquoi n’étais-je tout simplement pas jalouse tout le temps?)
Il ne m’a pas fallu longtemps pour arriver à une théorie: tout le monde a des besoins qui sont des prérequis à leur sentiment de compersion. Si ces besoins sont satisfaits, la compersion devient facile (ou moins ardue). Si ces besoins ne sont pas satisfaits, la compersion devient plus difficile, voire absolument impossible. Il a fallu plus de temps pour mettre cette théorie à l’épreuve et constater son efficacité dans la vie des gens et dans la mienne, et pour définir de manière approfondie ce que sont ces besoins prérequis à la compersion. Le résultat est un livre de 284 pages, appelé Compersion: Transcender la jalousie dans le polyamour.
Dans ce livre, je guide le lecteur en quête de découvrir ses propres besoins préalables à la compersion. C’est une invitation à élargir notre connaissance de soi à travers le développement d’une plus grande capacité de compersion.
Affectueusement,
Hypatia
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