Je n’ai rien publié depuis le début de cette pandémie. Qu’est-ce qu’une spécialiste de la compersion peut bien avoir de pertinent à dire sur la covid-19? Je ne suis pas épidémiologiste, alors je me contente de respecter le confinement, de me laver les mains pendant 20 secondes et de bien suivre les directives gouvernementales. N’empêche, mon cerveau d’écrivaine a parfois des éclairs d’inspiration au moment où je m’y attends le moins. Là c’était pendant que je faisais des retouches sur la peinture de ma chambre à coucher. Je réfléchissais à comment les gens s’encouragent tantôt à continuer une routine de vie comme si tout était normal, histoire de ne pas tomber dans la confusion, ou de se donner un break, pour une fois que le capitalisme ne nous tient plus sous l’étau de la performance. Les deux types de conseils semblent valables. Mais depuis quelques jours, je sens monter le ton entre ceux qui proposent l’une ou l’autre de ces attitudes face au confinement et à la perturbation du cours normal de nos vies. Et c’est là que mon expertise en matière de compersion entre en scène, parce que, tout compte fait, qu’on parle de polyamour ou de pandémie, on en revient toujours aux émotions humaines.
Deux types opposés de réaction au stress
Derrières ces idéologies et conseils bien intentionnés à propos de comment on devrait se comporter en temps de crise mondiale de la santé, sont subtilement en action des mécanismes profondément ancrés de la psyché humaine : Notre réaction au stress. Chacun de nous réagit différent. On connaît les classiques flight, fight or freeze, dont il a beaucoup été question lors du mouvement #metoo d’il y a quelques années. On a alors vu que chaque femme répondait différemment au stress d’une agression sexuelle. Mais nos réactions au stress s’appliquent à toutes les autres sphères de la vie, que ce soit notre réaction à un virus qui tue des milliers de gens dans la monde, ou notre réaction lorsqu’un de nos partenaires amoureux rencontre une nouvelle personne. Nous faisons face à l’inconnu, et notre cerveau aussi bien que notre corps se mettent en mode « survie » sans que nous prenions toujours conscience de comment cela affecte nos comportements.
En réponse au stress, certains d’entre nous entrent en mode « hyper-fonctionnel », tandis que les autres entrent au contraire en mode « sous-fonctionnel. » Les hyper-fonctionnels, en ce moment, sont en train de nous préparer à l’apocalypse, de faire des préparatifs de toutes sortes, de planifier, gérer et refaire le monde. Les sous-fonctionnels se reposent, réfléchissent, rassemblent leurs forces physiques et émotionnelles pour le moment où ils en auront le plus besoin.
Votre réaction au stress est valable
Quel que soit votre type de réaction, la première étape est de reconnaître que ce que vous vivez, ce qui vous pousse soit à agir frénétiquement ou qui vous paralyse, est votre réponse au stress. Quelque chose d’inconnu est devant vous, potentiellement dangereux, et-ou potentiellement une opportunité d’aller vers un monde meilleur, mais on ne sait pas encore, et on est aux prises avec plus de questions que de réponses. Un stress. Il peut être léger, modéré, ou frôler la panique, il n’en dicte pas moins les réactions qui nous animent.
L’étape suivante est de reconnaître quel est notre type de réaction : Est-ce que j’hyper-fonctionne, ou je sous-fonctione? Il ne sert à rien de se juger dans notre style. Un style n’est pas meilleur que l’autre. Par ailleurs, chaque style vient avec ses avantages et ses inconvénients, que l’on peut résumer, grosso modo, à ceci :
Avantages de l’hyper-fonctionnement :
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- Les choses qui doivent être faites se font.
- Sentiment d’efficacité et d’accomplissement.
- Possiblement le sentiment d’être la personne qui sauve la situation.
Inconvénients de l’hyper-fonctionnement :
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- Est une façon d’éviter de ressentir ses véritables émotions et d’y faire face.
- Augmente le stress des personnes en sous-fonctionnement qui se sentent jugées de ne pas arriver à « faire leur part. » En prenant tout sur leurs épaules, les personnes en hyper-fonctionnement privent les autres de s’impliquer à leur vitesse et à leur façon. La personne en hyper-fonctionnement, même si elle a plus d’énergie et de motivation, n’a pas nécessairement toutes les réponses, toutes les solutions, ni une meilleure compréhension que les autres. Prendre le temps de s’arrêter un peu pour entendre le point de vue des personnes en sous-fonctionnement les aiderait à être de meilleurs « joueurs d’équipe. »
- Perte d’énergie dans des choses qui ne sont pas toujours utiles.
Avantages du sous-fonctionnement :
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- On ne perd pas son énergie et son temps à courir dans toutes les directions. On s’en tient à l’essentiel.
- Sentiment d’avoir enfin le temps de réfléchir à ce qui est important et de prendre des décisions après avoir mûrement considéré les options avant de tirer des conclusions.
- Avoir du recul sur la situation.
Inconvénients du sous-fonctionnement :
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- La passivité des personnes en sous-fonctionnement est un poids pour ceux qui essaient de faire fonctionner les choses.
- Parce qu’elles ne sont pas dans l’action, les critiques et conseils des personnes en sous-fonctionnement peuvent être mal reçues par ceux qui travaillent fort.
- Faible sentiment d’accomplissement.
La réaction au stress de l’autre est valable également
Avez-vous porté des jugements sévères sur vos amoureux, vos amis, les membres de votre famille, parce qu’ils ont un style de réaction au stress différent du vôtre? Que ce soit en pleine pandémie, ou dans une crise de jalousie, voire la combinaison des deux, la réaction des personnes que nous aimons peut nous sembler incompréhensible et pourtant, elle est ce qu’elle est, valable parce qu’elle permet de s’adapter à une situation difficile.
La chose que les deux types ont en commun est que nous ressentons souvent de la honte d’être comme nous sommes. Les hyper-fonctionneurs se rendent bien compte qu’ils tapent sur les nerfs de tout le monde à se précipiter dans toutes les directions pour tout régler, alors que les sous-fonctionneurs se rendent bien compte que les autres prennent leur apathie pour de la paresse, un manque de discipline ou de courage. Dans tous les cas, tout le monde se juge lui-même, et se sent jugé par l’autre. Comprendre et accepter son propre style, et comprendre et accepter celui des personnes que nous aimons permet de mieux gérer une situation de stress en utilisant les forces de chaque groupe et en travaillant à minimiser l’impact des inconvénients de chaque style.
Restez à la maison et écrivez-moi vos commentaires! Affectueusement,
Marie-Claude,
alias Hypatia